« Eriol demande innocemment n’est-ce pas Aule celui que nous appelons Wéland et ils (Rúmil ?) disent en riant que non et parlent de Velindo ou Gwilion la fée — un de ceux du peuple d’Aule qui fut envoyé par lui dans le monde pour rapporter du bon et lourd or rouge des nains qui lui faisait besoin.
« Là son orgueil s’enfla à cause de la stupéfaction des hommes et des nains à son talent ; et il ne retourna jamais à Aule mais s’établit par lui-même — et son renom s’étendait jadis au loin mais avec l’effacement des fées son pouvoir a décliné. »1)
Parma Eldalamberon no 15 — Early Runic Documents — ER1 « Enʒlaʒesíþ »
ette page est consacrée aux premières versions des systèmes d’écriture inventés par Tolkien. Certaines d’entre elles sont les ancêtres conceptuels des écritures du Légendaire, bien que leurs noms n’aient pas grand chose à voir avec les conceptions finales de Tolkien : certaines lettres du valmarique sont déjà très proches des tengwar, même si la structure de cet alphabet devait par la suite subir de nombreux changements. D’autres semblent n’appartenir qu’aux strates anciennes de la conception linguistique de Tolkien, comme les lettres gnomiques ou le falassin.
Le valmarique était l’un des premiers alphabets inventés par Tolkien. Élaboré entre 1922 et 1925, il devait s’agir d’un système d’écriture elfique élaboré à Valimar. Il fit notamment l’objet d’un développement spécial pour le qenya et on dispose également de traces d’un mode gondolique employé pour le noldorin. Toutefois, les textes valmariques les plus longs que l’on connaissent sont rédigés en vieil anglais et en anglais contemporain.
Le qenyatique, que Tolkien appelait aussi qenya simplex, était spécifiquement destiné à représenter le qenya. Tolkien se servit notamment de ce système d’écriture pour écrire des fragments du poème qenya Narqelion, mais ne précisa pas quels peuples de son Légendaire employaient ce système d’écriture. Le document mentionnant le nom qenya simplex comporte aussi un mode inachevé qui devait servir pour l’anglais.
Le système phonémique du falassin est relativement souple. Tolkien utilisa diversement cet alphabet pour représenter l’anglais, le latin et le qenya. On ignore quels devaient être les utilisateurs du falassin dans le cadre du Légendaire, mais son nom semble pointer vers les habitants des Falas de Beleriand ou plus probablement vers les Teleri qui habitaient sur les côtes de Valinor. Aucun texte n’indique cependant que ces peuples avaient developpé un alphabet qui leur était propre.
Le groupe des alphabets noriaques regroupe en fait trois alphabets manifestement élaborés à la même époque par Tolkien : le noriaque, le banyarique et le sinyatique. Les trois alphabets se retrouvent sur un même document, ce qui tend à prouver que Tolkien envisageait leur coexistence dans le cadre du Légendaire. En-dehors de leur nom, on ne dispose guère d’information sur leur utilisation par les Elfes, vu que les seuls textes écrits dans ces trois alphabets sont en anglais.
Tolkien adapta fréquemment ses alphabets inventés à l’anglais. Il devisa l’angloq(u)enya ou andyoqenya dans ce seul but. Ce système d’écriture est fort bien attesté : on le retrouve sur pas moins de six documents différents de la seconde moitié des années 1920. Nombre de caractères de l’angloquenya ressemblent déjà aux tengwar que Tolkien inventera plus tard, bien que certains d’entre eux évoquent toujours le valmarique.
Le qenyatique 1929 est attesté dans un seul document, intitulé « Qenyatique. Usage anglais (1929) ». Il n’est accompagné d’aucune précision sur son usage dans le Légendaire. Il constitue l’étape finale d’élaboration des alphabets pré-fëanorien et est intermédiaire entre le groupe angloqenya de la fin des années 1920 et les premiers spécimens de tengwar présents dans « Les Étymologies ».
Tolkien appréciait particulièrement les runes anglaises du fuþorc. Il entreprit à plusieurs reprises de deviser des variantes de cet alphabet pour représenter les sons ou l’orthographe de l’anglais moderne. Les tableaux runiques résultant rangent fréquemment les runes suivant l’ordre alphabétique classique plutôt que l’ordre traditionnel du fuþorc. C’est une version plus tardive de cet alphabet runique qui devait lui servir pour les inscriptions runiques figurant dans le Hobbit.
Longtemps avant la rédaction du Hobbit, Tolkien envisagea d’intégrer les runes germaniques dans le cadre du Légendaire qu’il élaborait. Plusieurs documents contiennent des textes runiques qui s’inspirent du fuþorc anglo-saxon et du fuþark scandinave, auquel Tolkien ajouta parfois des caractères supplémentaires afin de représenter les sons de l’anglais moderne. Comme pour les runes anglaises, les tableaux runiques résultant rangent fréquemment les runes suivant l’ordre alphabétique classique plutôt que l’ordre traditionnel des runes germaniques.
Les lettres de Junius sont une élaboration des alphabets figurant dans le Gothicum Glossarium de Francis Junius. Trois séries de lettres sont listées dans un document probablement rédigé entre 1918 et 1920 : Waldemars Runen, lettres gothiques et lettres anglo-saxonnes. Les « runes de Valdemar » correspondent à une variante danoise du fuþark remontant au XIIIe siècle, tandis que les deux autres séries se rapprochent considérablement des caractères latins.
Les lettres gnomiques sont uniquement attestées sur une feuille d’examen de l’Université de Leeds, ce qui les fait remonter à la période 1920-1925. Elles semblent explicitement destinées à représenter la langue gnomique. Bien que Tolkien ne leur adjoigne aucune explication, il semble avoir considérer leur évolution diachronique et la création de caractère cursifs à partir d’une écriture script.
Il existe deux versions des runes gondoliniques, une écriture script et une cursive. Élaborée par Tolkien entre 1920 et 1930, cette écriture devait être en usage dans la cité de Gondolin et servir principalement à écrire le noldorin. Il s‘agissait du seul système d’écriture proprement runique inventé par Tolkien lorsque celui-ci entreprit de rédiger le Hobbit. Il est donc probable qu’à cette époque Tolkien considérait que les runes inscrites sur les épées Orcrist et Glamdring étaient de variété gondolinique.
La skirditaila, ou iskirttêl « série runique », était supposée être le premier alphabet adopté par les ancêtres des Edain, avant même qu’ils n’arrivent en Beleriand. Elle était dérivée de la variété leikvienne de l’Alphabet de Dairon, que Tolkien considérait alors avoir été inventé par les Daniens. Les runes des Nains devaient alors être partiellement dérivées de la skirditaila. Il est probable que Tolkien souhaitait aussi créer un lien imaginaire entre ce système de runes et les alphabets runiques historiques comme le fuþark.